Les carnets de Léonard de Vinci

Les Manuscrits de Léonard de Vinci © Institut de FranceDescription des carnets

Ces douze carnets datent de 1487 à 1508 environ. Au format et au contenu variés, ils sont plus scientifiques et techniques qu'artistiques. Certains ont un très petit format et pouvaient tenir dans la poche de l'artiste. Ils contiennent des notes, des croquis et des ébauches de traités sur des sujets divers qui n'ont pas encore tous perdu leur mystère.

L'écriture de Léonard de Vinci – qui était gaucher - est inversée et se lit de droite à gauche. Sa langue est l'italien mêlé de dialecte lombard. Son orthographe est personnelle et il n'use d'aucune ponctuation ni d'accentuation.

A la fin du XVIIIe siècle ces carnets furent distingués au moyen de lettres, de A à M, qui les caractérisent toujours.

Le Manuscrit A 
vers 1490. À moins de quarante ans, Léonard de Vinci y esquisse un Traité de la peinture.

Le Manuscrit B 
le plus ancien des douze, date de 1487-1489 et montre l'intérêt de Vinci pour l'architecture, tant civile que militaire et les machines volantes.

Le Manuscrit C 
composé en 1490-1491, est consacré à « l'ombre et à la lumière » c'est-à-dire aux variations des formes en fonction de leur éclairage et à diverses observations d'optique appliquées à la peinture.

Le Manuscrit D 
composé en 1508-1509, est consacré à l'étude de l'œil et à la science de la vision pour laquelle Vinci s'inspira des auteurs anciens (Avicenne) mais aussi de sa propre expérience.

Le Manuscrit E
traite principalement des poids mais aussi des thèmes chers à Vinci : la géométrie, la peinture, le mouvement, la technologie, l'eau. Il fournit l'état de ses recherches en 1490-1492.

Le Manuscrit F
aborde divers sujets tels que l'eau, ses mouvements et sa domestication, les pompes hydrauliques, mais aussi des thèmes d'optique et de géométrie.

Le Manuscrit G
la première moitié contient un groupe de dessins et de notes à la sanguine sur les plantes et leur croissance ; la seconde partie traite de géométrie, du vol des oiseaux, de la technologie, de l'eau, de l'optique, du mouvement.

Le Manuscrit H
le thème de l'eau y est dominant, sous l'aspect de sa force et de la violence des courants. On y trouve aussi des notes de grammaire latine car Vinci, à quarante ans passés, se décida à apprendre le latin pour accéder aux ouvrages scientifiques.

Le Manuscrit I
on y retrouve les thèmes de l'eau et de la mécanique, de la géométrie euclidienne et diverses études à la sanguine.

Le Manuscrit K 
contient des études de géométrie, d'anatomie, de canalisation de l'eau et d'architecture avec des références à la période où Léonard travaillait pour Charles d'Amboise, gouverneur français de Milan.

Le Manuscrit L
contient des croquis de fortifications et d'architecture militaire datant des années 1502, quand Léonard servait César Borgia en qualité d'« architecte et ingénieur général », et de 1504.

Le Manuscrit M
est dédié à la géométrie et à la physique mais contient aussi des notes de botanique, des dessins d'emblèmes et des études de ponts.

 

Comment les carnets devinrent la possession de l'Institut de France

Léonard donna par testament ses manuscrits et dessins à son ami Francesco Melzi qui les rapporta à Milan et les conserva jusqu'à sa mort en 1570. Ils furent ensuite vendus par le fils de Melzi, réorganisés, dispersés, parfois perdus.

Presque tous les carnets de l'Institut proviennent du comte Galeazzo Arconati qui les avait achetés aux héritiers de Pompeo Leoni, puis donnés en 1637 à la Biblioteca Ambrosiana de Milan. Le manuscrit C était entré dès 1609 à l'Ambrosiana, après être passé entre diverses mains privées, et le manuscrit K fut donné à cette même bibliothèque en 1674 par le comte Orazio Archinti.

Lorsque Bonaparte entra à Milan en vainqueur, en 1796, à la tête de l'armée de la jeune République française, il imposa à la Lombardie un tribut de guerre et la confiscation d'œuvres scientifiques et artistiques majeures. Ses délégués, et notamment le mathématicien Gaspard Monge, choisirent à la Biblioteca Ambrosiana plusieurs caisses de biens qui prirent le chemin de la France et plus particulièrement de la Bibliothèque Nationale à Paris. Seuls les douze carnets furent remis à l'Institut National, car là les attendaient des savants capables de les étudier, ce qui fut fait dans les années suivantes.

En 1815, lors de l'occupation de Paris par les alliés à leur tour vainqueurs de Napoléon, la restitution des biens artistiques fut décidée, mais l'on pensa surtout à visiter les grands dépôts. Les petits manuscrits de l'Institut, ni repérés ni réclamés, furent tout simplement oubliés.

En 1848, le comte italien Guglielmo Libri-Carrucci (1803-1869), personnalité complexe (mathématicien et historien des sciences, professeur au Collège de France, membre de l'Académie des sciences), s'enfuit en Angleterre après avoir volé dans les bibliothèques françaises un grand nombre d'imprimés et de manuscrits précieux. En 1850, un procès le condamna à dix ans de prison par contumace mais il mourut en exil sans être revenu en France. 

En 1847, il avait pu vendre en Angleterre une partie de sa collection, dans laquelle se trouvaient 34 feuillets de Léonard de Vinci, prélevés dans le carnet A - sur 98 feuillets- et 10 feuillets sur 100 dans le carnet B. Ces feuillets prirent alors le nom de leur acquéreur, Lord Bertram, quatrième comte d'Ashburnham (mort en 1878) et devinrent le Codex Ashburnham 1875/1-2.

En 1891, les feuillets volés furent rendus à l'Institut de France, après avoir été récupérés par la Bibliothèque nationale en 1888. Entre 1888 et 1891, ils portèrent à la Bibliothèque nationale la cote "Manuscrit italien 2037-2038". Ils sont aujourd'hui conservés à l'Institut sous la cote Ms 2184-2185 et sont considérés comme des suppléments des carnets A et B.

Libri avait aussi volé, dans le Carnet B de Léonard de Vinci de l'Institut, un cahier de 18 feuillets, connu depuis sous le nom de Codex sur le vol des oiseaux ou Codice sub vollo di ucelli ou Codice degli uccelli (1505) et conservé aujourd'hui à la Bibliothèque Royale de Turin.

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